Dans Paris vu du sol, je continue de questionner la perception d'une réalité ordinaire, et j'explore en même temps la possibilité d'une narration filmique différente en utilisant le médium vidéo.
Tout film a forcément un début (la première image) et une fin (la dernière). L'écoulement du temps entre ces deux images constitue de facto une chronologie qu'il faut structurer pour que le spectateur suive le "récit". Sans scénario, la narration de Paris vu du sol est induite par la feuille de route du tournage, évoquée ici au sens propre, puisque j'ai suivi à pied le tracé de la ligne 2 du métro parisien, en partant de la place de la Nation (son extrémité Est), jusqu'à la Porte Dauphine (le terminus Ouest). Mon choix de suivre une ligne de métro qui traverse la ville fut d'abord assez arbitraire, mais ne m'a pas semblé dénué de sens, car j'emprunte cette ligne plusieurs fois par semaine. J'allais ainsi relever le défi paradoxal de partir à l'exploration d'un terrain familier. Ce parti-pris déambulatoire se poursuit au montage, puisque les plans sont montés dans l'ordre chronologique des prises de vues.
Les prises de vues sont des plans fixes et mettent en exergue une action réduite à son expression la plus minimaliste. Des gestes banals ou des mouvements d'objets qui alimentent plus ou moins discrètement le paysage sonore urbain, et qui prennent ici une dimension inversement proportionnelle à leur présence, pour une lecture différente d'une ville au quotidien.
Ce film a reçu le prix du public au 21e festival Cinérail de Paris en 2015, et a été sélectionné au 33e TISFF (Téhéran, 2016) ainsi qu'au 8e CVF (Le Caire, 2017).